Il y a des moments où l’on ne sait plus quoi faire. On manifeste, on signe, on crie, on écrit. Et pourtant, un sentiment d’impuissance colle à nos gestes. Comme si tout était joué d’avance. Comme si notre colère n’avait plus de prise.
Depuis des mois, Gaza nous hante. On regarde, on tente de réagir, mais on se sent figés – spectateurs de l’horreur, coincés ici, à chercher comment exister politiquement face à l’indicible.
Et puis il y a eu la flottille des derniers jours. Rima Hassan, Greta Thunberg, et tou·te·s celles et ceux qui ont embarqué dans cette action ont ouvert une brèche. Une respiration dans l’étouffement général.
Un rappel brutal pour tous les militants : nous ne sommes pas impuissant·es.
Il reste des gestes qui peuvent déranger, bouleverser, faire entendre ce que tant veulent étouffer. L’équipage de la flottille a fait plus que d'essayer de livrer des vivres : il nous a transmis une force. Une ressource collective contre l’abattement. Une preuve qu’il est encore possible de se battre – autrement, audacieusement, avec courage. Et, peut-être surtout, une façon de desserrer cette culpabilité étouffante qui accompagne notre impuissance. Parce qu’au lieu de nous faire sentir fautif·ves de ne pas en faire assez, elles nous montrent qu’il y a encore des voies d’action possibles, des gestes concrets, des élans collectifs.
Mais il faut le dire clairement : le véritable héros, c’est avant tout le peuple palestinien, sacrifié depuis plus de 80 ans, qui paie le prix des guerres, des crimes et des intérêts des grandes puissances coloniales. Ce sont elles et eux qui résistent jour après jour, dans les pires conditions, avec une dignité que l’histoire retiendra.
Et pourtant, dans nos contextes dits « occidentaux » en tant que militant·es anticapitalistes, antiracistes et anticoloniaux, l’action de la flottille nous a redonné quelque chose de précieux : de l’espoir, une voie, un champ des possibles.
Merci à elles. Ce qu’elles ont fait, ce qu’elles ont risqué, ce qu’elles ont provoqué, nous oblige. Et nous rappelle pourquoi nous luttons.
Edon Duraku
